Le lendemain, Aidan se réveilla le crane douloureux payant ainsi le prix de ses agapes. Il avala un médicament en même temps qu’un café mais il était toujours préoccupé par les propos entendu la veille au pub.
Il ne savait pas s’il devait en parler et à qui. Il avait bien conscience de la gravité de la situation mais craignait de déclencher plus de problèmes qu’il ne l’aurait voulu. Après tout il était le seul à les avoir entendus, il pourrait simplement choisir de se taire. Mais quand même, si c’était important il fallait que les dirigeants du Vadolandia en soient informés. Il devait prendre une décision.
Lorsqu’il sortit de ses quartiers c’était fait.
Il arriva à l’astroport, les lieux étaient déserts, les immenses hangars s’alignaient sur la partie droite jouxtant les bâtiments de l’administration.
Quelques appareils prêts pour le départ étaient sur la zone de lancement. Il avança sur l’allée qui bordait les hangars. Le vent était froid et poussait les nuages gris dans le ciel triste. Aidan remonta le col de son blouson en frissonnant.
Lorsqu’il arriva à la hauteur du dernier bâtiment il vit le vieux croiseur qui servait d’habitation et de moyen de transport à l’étrange Luluberlue, improbable diplomate du Vadolandia.
Il avait compris très jeune que sa grand-mère ne pouvait pas être comparée à celles de ses camarades mais il avait pour elle de la confiance et du respect.
Il grimpa l’échelle du croiseur et frappa fermement 3 coups sur la carlingue. La porte s’ouvrit dans un grincement métallique. Il pénétra dans l’habitacle sombre dans lequel il distingua la frêle silhouette revêtue d’une robe safran de sa grand-mère. Assise derrière un bureau recouvert de paperasses, elle procédait à différents réglages sur des écrans luminescents.
- Que me vaut l’honneur de ta visite ? dit-elle sans se retourner
Pourquoi est toujours aussi difficile de parler avec elle se demanda Aidan. Il soupira, s’assit et lui fit le récit de la conversation surprise la veille au pub.
Quand il eut terminé, elle se retourna et le regarda avec malice.
« Tout d’abord Aidan, tu as très bien fait de venir m’en parler, mais tu dois apprendre à être prudent. Dans les couloirs de la confédération tu vas entendre un grand nombre de rumeurs dont certaines seront fondées et d’autres tout à fait fantaisistes. Tu devras donc apprendre à tirer le bon grain de l’ivraie.
As-tu la moindre idée de quel dirigeant il s’agissait ? hé bien je vais te le dire moi, il s’agissait du dirigeant du Mikanésia.
Aidan ne dit mot, le mikanesia était vraisemblablement l’Etat le plus conspué de la galaxie, connu pour la violence de ses attaques et le caractère intraitable de son dirigeant, nombreux étaient les Etats qui se réjouissaient de sa disparition. Depuis la galaxie connaissait une paix relative, en tout cas la guerre était finie. L’ombre angoissante du Mikanesia ne flottait plus sur les territoires galacticains.
Depuis la disparition du Mikanésia, reprit Luluberlue, les rumeurs les plus folles courent à tous les niveaux de la hiérarchie galacticaine.
Elle se mit à rire. La plupart des Etats ne rêvaient que de sa disparition tant il était craint et détesté. Maintenant qu’il n’est plus là on dirait qu’il leur manque.
La rumeur de son retour a couru aussi. Certains ont cru le reconnaitre sous les traits de son ancien Maître le Nécrolia, d’autres derrière un jeune Etat un peu trop bien protégé.
Personne ne connait avec exactitude les circonstances de sa disparition et étrangement cela le rend encore plus présent que s’il était là.
Aidan, rejoins ton monde et ne te préoccupe pas du passé, il appartient à d’autres. Tu vas entendre beaucoup de choses, ne t’en mêle pas et laisse à leur logorrhée ceux qui n’existent que par le verbe.
Sur ces paroles, la vieille revint à ses écrans qui commençaient à clignoter de manière inquiétante et Aidan sortit du croiseur pour rejoindre son poste.